Extrait :
Portrait de l’Artiste
En Hercouille de Foire.
Singe de quête et montreur de quèquette !
Crieur pubis !
Ramoneur de Ramona !
Danseur de vulves de Strauss !
Monstre de Balloches-Ness dans un Palais d’Erreur !
Hercouille de Foire !
Tous les métiers ! Tous ! Il les a exercés tous !
Bijoutier chez Van Cleef et Apoils !
Berger chez Mouton-Rothschild
Ou Facteur d’amour pour femmes chevales !
Toutes les femmes ! Toutes ! Il les a aimées toutes !
Naphtaline Renaud – dans une vieille armoire ! -,
Marguerite Durex et Marguerite Durable (deux increvables),
Sodome et Godot,
Saint-Pierre et Micheton : même les garçons !
Que mec, comme disait Sénèque (1er siècle) !
Quel mec,
Ce Veheggen (1942 – Fin vingtième sexe) !
Cela a beau avoir la couleur de l’eau et ce n’en est pas moins de la vodka, cela ressemble aux « Grosses têtes » de Philippe Bouvard, mais c’est de la vraie littérature.
Et si le rire devenait l’essence d’une autre poétique ? Un rire qui volerait la vedette au tragique, au désespoir, un rire non noir mais franc et véridique qui se justifierait par sa présence comme résonnance du corps en frémissements, hoquets ou éboulements car il s’agit bien de torsions et de spasmes lorsque l’irrésistible nous prend. Ces bons mots et ces mauvais font dans cette nouvelle écriture, office de rimes mais en vérité il y a autant d’humeurs chez Verheggen que de musique chez Verlaine. Il y a l’idée d’une progression de la bouffonnerie, de la blague facile et du calambour salace qui s’accumulant au fil des pages font monter l’esprit jusqu’à un orgasme d’expression délirante : ce débordement et cette omniprésence donnent l’impression poétique juste. Serait-ce la mise en papier savamment réalisée de ces séances de thérapie par le rire qui servent de marronnier au journal de 20h00 ? La poésie de Verheggen répond à des besoins réels, de bouffonnerie, de grossièreté, de dérision mais réussi ce pari avec la grande intelligence et le panache des maîtres de poésie. Il nous propose par ce ridicule une réappropriation des « choses de la vie » qui deviennent : des « choses de la bite » (ça pourrait être du Verheggen) et ainsi, de retirer le rideau de la romance pour dévoiler le nécessaire : la volonté d’une jouissance inconditionnelle de la vie (ou du vit), une célébration rabelaisienne de l’existence.